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Les journalistes, "une espèce en voie de disparition"

Le XVI ème congrès de la presse française, organisé en ce moment à Lyon, coïncide avec les Etats Généraux voulus par le président Sarkozy. Une initiative qui fait grincer des dents et met surtout à jour les grandes difficultés des journalistes et leur précarisation dans un contexte de crise (voir article de LYon-Actualités).


Entre développement des gratuits, montée en puissance des sites webs et résistance de la presse papier, la presse lyonnaise vit depuis plusieurs années une période plus que tourmentée , enchaînant plans sociaux et redressements judiciaires.

Des journalistes en voie de disparition
Alors que le décrochage de M6 Lyon lancé il y a 15 ans va disparaître, au même titre que ceux de Bordeaux, Lille, Marseille et Toulouse, la percée de la TNT conjuguée au projet de loi sur la réforme de l’audiovisuel public conduisent, selon le site internet du club de la presse de Lyon, "à une véritable mutilation du paysage audiovisuel régional".
Comme dans les autres clubs de France, les journalistes de terrain pointent les mêmes problèmes préoccupants : "concentration des médias, en particulier entre les mains d’industriels sans rapport avec la presse et vivant de commandes de l’Etat ; recul du pluralisme ; marchandisation de l’information ; rédactions réduites au profit d’emplois précaires ; dégradation des conditions de travail entraînant de nombreuses dérives dans l’information…"

Les journalistes perdent leur indépendance en devenant "communiquants"

Depuis plusieurs années, l'hémorragie de journalistes "saigne" les rédactions des médias au profit des services de communication des entreprises et des grandes collectivités locales. C'est ainsi que le service communication de la Région Rhône-Alpes est passé de 1 personne au temps de Charles Béraudier dans les années 70 à une équipe importante, dont une bonne part de journalistes aujourd´hui, sous la présidence de Jean Jack Queyranne !".

Il en est de même dans toutes les villes ou communautés de communes qui ont peu à peu créé leur "service communication" en faisant appel à des ex-journalistes. Le métier a ainsi peu à peu évolué vers la communication, ces professionels sacrifiant leur indépendance au profit d'une sécurité de fin de carrière.

Audiovisuel : TLM toujours dans le rouge et France 3 dans l'incertitude

La télévision locale TLM, elle, est maintenant regroupée, sous l'égide du Crédit Mutuel, avec un groupe de presse composé du Progrès, du gratuit Lyonplus et du site internet leprogres.fr. Mais malgré ce regroupement, la chaîne, toujours dans le rouge avec un déficit de 1,7 million d’euros, s’apprêterait à réduire ses effectifs avec quatre départs volontaires sur un total de 39 personnes.

À France 3 Rhône-Alpes, le rédacteur en chef Alain Astarita assure, toujours d'après le club de la presse, que "l’info restera encore la colonne vertébrale de la chaîne et n’aura pas besoin de consulter un ostéopathe". Mais le directeur régional Patrick Darroze rappelle que le site régional est le plus visité de France et que désormais “On fait de la télévision sur internet”.

La concentration se poursuit

Quelle économie pour la presse lyonnaise, c' est un peu la question sous tendue par le nouveau Points d'actu de la bibliothèque municipale. Un état général proche du coma dans lequel tentent de survivre un certain nombre de titres indépendants. Mais si les journalistes de LyonMag, en grande difficulté financière, disent vouloir faire face à la volonté de rachat par le PDG du groupe Fiducial, ceux de Lyon Capitale ont déjà franchi le pas. En occupant le même créneau du "mensuel haut de gamme" ces deux magazines se sont d'ailleurs engagés dans une "lutte à mort" .

Des journalistes précaires... mais satisfaits !
Dans ce contexte, le club de la presse vient de publier une intéressante enquête (télécharger ici le fichier PdF) : dans ce dossier intitulé "journaliste aujourd'hui, quel métier demain", on apprend que le métier a continué tout au long de la dernière décennie à se précariser (les salaires moyens n'ayant pas augmenté depuis dix ans ! ), que les journalistes sont en général bien formés et diplomés, que la précarisation est encore plus accentuée chez les femmes, mais que paradoxalement plus de 85 % sont satisfaits d'exercer ce métier !
"Un métier dont on a toujours rêvé, intéressant et diversifié, choisi par vocation" (71,6%) pour lequel ils restent "motivés" (75%) malgré des pertes sensibles de qualité de vie, de salaire, de reconnaissance et des contraintes professionnelles (travail dans l'urgence, manque de moyens financiers de leurs médias, pression des annonceurs...) dont ils sont particulièrement conscients.


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Commentaires

  1. Anonyme3:56 PM

    Les journalistes perdent leur indépendance en devenant "communiquants" ... En effet, ça devient une tendance lourde dans la profession, qui oublie souvent la vérification d’un fait en privilégiant l’effet d’annonce, quitte à démentir, avec beaucoup moins d’impact...
    Une info et un démenti, c’est deux infos disait Lazareff il y a 50 ans, mais c’est comme la calomnie, il reste toujours quelque chose de la fausse info, et moins de chose du démenti...

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  2. Anonyme7:44 PM

    Les "régionaux indépendants" se structurent : La Fédération de la presse magazine régionale (FPMR) qui regroupe 16 éditeurs de magazines en région, a réuni son assemblée générale ce vendredi 21 novembre à Lyon en marge du Congrès de la Presse Française.
    Au terme de cette AG, la FPMR a décidé de faire évoluer ses statuts, de changer de nom et d’élire un nouveau bureau pour recentrer son action sur la défense du pluralisme, des régions, des petites structures
    indépendantes et des contenus rédactionnels.
    Voilà pourquoi désormais la FPMR a décidé de fédérer non plus les seuls magazines régionaux mais tous les éditeurs indépendants de la presse régionale qui se battent pour une information de qualité. Ce qui exclut tous les médias qui ne sont pas dirigés par des journalistes et dont le capital est contrôlé par des groupes financiers ou industriels.
    D’où la décision de renoncer au nom “FPMR” pour prendre celui de
    “Régionaux Indépendants”.
    Les “Régionaux Indépendants” ont concrétisé ce tournant en élisant un nouveau président, Philippe Brunet-Lecomte, directeur-rédacteur en chef de Lyon Mag qui a défini le sens de l’action qu’il compte mener : “La crise de la presse n’est pas une crise technique mais une crise
    morale. Car aujourd’hui, si l’audience de la presse écrite est en baisse, c’est d’abord parce que les lecteurs ne lui font plus confiance.
    Cette perte de crédibilité exige de renforcer les contenus rédactionnels en permettant aux journalistes de jouer un rôle moteur pour impulser une nouvelle dynamique. Voilà pourquoi les Régionaux Indépendants vont se
    mobiliser pour défendre l’indépendance et la qualité de l’information en région mais aussi l’innovation et le pluralisme.”

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  3. Dix propositions concrètes. Voici le texte intégral qui a été adressé par Philippe Brunet Lecomte au président de la République.

    Voici 10 propositions pour recentrer le débat sur trois réalités majeures de la presse écrite en France : les régions, les petites entreprises et la responsabilisation des journalistes. Car l’essentiel de la presse écrite est ancrée en région, ne serait-ce qu’en terme d’audience. De plus, les petites structures jouent un rôle essentiel en terme de dynamique et d’innovation. Enfin, il ne faut pas oublier que le moteur de cette presse écrite, c’est le contenu produit par les journalistes qui sont de moins en moins associés aux stratégies rédactionnelles.

    Ce qui explique en partie la crise actuelle. Et l’incapacité de la presse écrite à proposer des solutions concrètes pour impulser une dynamique nouvelle.

    1. Rendre le pouvoir aux journalistes en les responsabilisant

    - former les journalistes à la gestion, à la stratégie, au marketing... Notamment les cadres des rédactions. En encourageant la création d’écoles spécifiques pour qu’ils deviennent des journalistes entrepreneurs, soit créateurs d’entreprise soit gestionnaires actifs des entreprises où ils travaillent en étant étroitement associés aux stratégies des entreprises de presse.

    - élaborer un nouveau statut des entreprises de presse qui facilitent l’émergence des journalistes à des postes décisionnaires (gestion, stratégie...), quitte à imposer des quotas.

    - inciter les journalistes à créer des entreprises de presse, notamment en région, en développant des fonds d’investissements spécifiques qui puissent également accompagner ces créations de conseils et d’assistance.

    2. Protéger et développer les petites structures

    - encourager la fédération de ces petites entreprises de presse pour qu’elles puissent mutualiser certaines charges et certains investissements afin d’alléger leurs coûts : impression, papier, régie publicitaire, recherche-développement... A travers la création de GIE.

    - créer des laboratoires de l’innovation en région pour développer de nouveaux concepts adaptés aux attentes du public avec obligations de résultats. Labos qui procéderont d’abord à un état des lieux territorial et qui seront cofinancés par les grands groupes de presse et qui pourraient bénéficier d’aides publiques sur des projets précis.

    - développer une syndicalisation des entreprises de presse non plus seulement par périodicité (quotidien, hebdo...) ou la nature des supports (papier, télé, radio...) pour privilégier une logique régionale.

    - associer les grands groupes de presse régionaux et nationaux à cette dynamique pour qu’ils aident et encouragent ces initiatives sans les phagocyter. Mais aussi les groupes audiovisuels et de gratuits qui puisent largement dans les contenus de la presse écrite.

    3. Remettre les régions au centre d’une nouvelle dynamique presse

    - rétablir un vrai pluralisme et une vraie concurrence dans les régions où des grands groupes ont une position de quasi monopole, ce qui bloque toute innovation. Et ce qui est préjudiciable à ces grands groupes qui, vu leur lourdeur, ont une faible réactivité notamment face à la crise. Mais aussi ce qui stérilise les contenus.
    C’est un élément essentiel pour la presse qui est avant tout régionale en terme d’audience et de diffusion mais également pour la décentralisation elle-même qui souffre de cette pauvreté médiatique en région, à la différence, par exemple des Etats-Unis.

    - imposer la transparence des budgets publicitaires des collectivités locales en créant des règles simples justifiant ces investissements publicitaires sur la base de l’audience et non des contenus. Tout en protégeant les start-up. Au nom d’une gestion saine de l’argent public. Un principe qui doit également s’appliquer pour les budgets nationaux des grandes administrations.

    - encourager l’implantation des “élites” journalistiques en région pour éviter cet “exode” à Paris où seule une minorité s’impose dans un univers ultra-concurrentiel alors que les autres se stérilisent dans des galères avant de se reconvertir dans d’autres secteurs d’activité. Ce qui prive les régions d’un certain nombre de “cerveaux”. Pour cela il faudra développer des “passerelles” professionnelles Paris-Régions.

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